L’une des questions soulevée par le contentieux pertes d’exploitation consécutif aux mesures de confinement est de déterminer s’il faut agir en référé provision ou s’il est préférable d’agir directement au fond.
La jurisprudence, de plus en plus nourrie sur le sujet, nous rappelle que le contentieux pertes d’exploitation n’est rien d’autre que l’application du droit commun, tant assurantiel que procédural. C’est, une fois de plus, le sens de l’arrêt rapporté de la Cour d’appel de Versailles rendu le 8 avril 2021.
Dans cette affaire, plusieurs entreprises hôtelières ont engagé une action en référé à l’encontre de la société Albingia, en sa qualité d’assureur « Multirisque Hôtelier », au titre des pertes d’exploitation subies à la suite des mesures de confinement du mois de mars 2020. Ces dernières réclamaient plus particulièrement une provision d’un montant de 450.000 euros sur le fondement de l’article 873 du Code de procédure civile, ainsi que la désignation d’un expert afin de chiffrer les pertes. Par ordonnance du 17 juillet 2020, le Tribunal de commerce de Nanterre a fait partiellement droit à ces demandes, en accordant des provisions aux différentes entités hôtelières, ainsi que la désignation d’un expert judiciaire.
La société Albingia a vivement contesté cette décision en soutenant, notamment, que les conditions de la garantie n’étaient pas remplies, et en se prévalant d’une clause d’exclusion rédigée comme suit : « Les pertes pécuniaires résultant des épidémies de grippe aviaire ou de toute forme virale en dérivant, de pneumonie atypique (SRAS / Syndrome Respiratoire Aigu Sévère), de tout syndrome de type grippal dans le cadre d’une pandémie ainsi que des retraits d’autorisations administratives ou des mesures sanitaires prises par les autorités publiques du fait de ces épidémies ou pandémies ainsi que du fait des risques qui y sont liés ».
De manière fort logique, la Cour d’appel de Versailles a infirmé l’ordonnance du 17 juillet 2020 en ce qu’elle a accordé des provisions aux entités hôtelières, rappelant l’évidence, à savoir qu’en raison de contestations sérieuses de l’obligation de garantie de la société Albingia et de la nécessité de se livrer à une interprétation de la clause contractuelle, l’affaire ne relevait pas des pouvoirs du juge des référés.
Avec un brin de recule, il est possible d’affirmer que le contentieux pertes d’exploitation « Covid » n’est rien d’autre…qu’un contentieux classique de droit des assurances, et d’interprétation des obligations de garantie.
L’argumentation d’Axa selon laquelle les conséquences d’une pandémie seraient inassurables a fait long feu. Immédiatement qualifiée de fantaisiste par Tribunal de commerce de Paris dans son jugement du 12 mai 2020, n° 2020017022, le contentieux s’est concentré, depuis lors, sur l’interprétation des obligations de garantie.
Une part importante du contentieux porte, en effet, sur l’interprétation des obligations de garantie, ainsi que sur la validité des conditions et des exclusions de garantie (par exemple TC Marseille, 23 juillet 2020, n° 2020R00131).
Or, naturellement, l’interprétation des obligations d’un contrat d’assurance relève, en principe, de la compétence du juge du fond.
A partir du moment où il est question d’interprétation des garanties ou de discussions de la validité des conditions et des exclusions de garantie, les demandes de provision ont peu de change de prospérer par devant le Juge des référés, juge de l’évidence.
C’est donc à juste titre que plusieurs arrêts de Cours d’appel sont venus infirmer des ordonnances ayant condamné l’assureur à des provisions alors même qu’il existait des discussions sur l’interprétation de l’obligation de garantie, ou sur la validité de l’exclusion, à l’instar de l’arrêt commenté de la Cour d’appel de Versailles du 8 avril 2021 (que l’on peut rapprocher, par exemple, de l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 3 décembre 2020, n° 20/07308).
Il en ressort que les actions de référé provision engagées au titre de pertes d’exploitation Covid expriment avant tout une erreur de stratégie.
Il semble donc beaucoup plus opportun d’engager directement l’action en indemnisation des pertes d’exploitation devant le juge du fond, quitte à réclamer une expertise judiciaire sur le fondement de l’article 143 du Code de procédure civile au cours de cette même procédure.
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